Le 23 juin 2016, au cœur de l’Euro 2016 de football, le CPNA a convié quelques journalistes sportifs nantais à venir s’exprimer sur leur façon d’exercer leur métier. Et leurs relations souvent compliquées avec les joueurs et les dirigeants des clubs d’élite. Ambiance.
Les journalistes sportifs sont-ils des supporters ? Oui, si l’on en croit Florent Houzot, directeur des rédactions de Bein Sports qui a refusé lors du premier tour de l’Euro 2016 de football, de céder les images montrant le bras d’honneur – ou « la sarabande » c’est selon – du Français Paul Pogba (1). Non, selon les journalistes sportifs nantais qui avaient répondu à l’invitation du CPNA, le 23 juin dernier au restaurant le Manaïche (Nantes).
La discussion entre la dizaine de participants présents a surtout été l’occasion de mettre en évidence une incompréhension autour du métier de journaliste. Comme l’a expliqué Pierre-Yves Leroux (RMC – BFM TV), « bien souvent, les supporters mais aussi les joueurs et les dirigeants des clubs que nous suivons, attendent que nous nous comportions en supporters ».
Défense de critiquer !
Autrement dit, la critique ou toute information qui ne va pas dans les sens des intérêts du club ou des joueurs est exposée à d’éventuelles représailles. Lesquelles peuvent prendre la forme de réflexions désobligeantes, d’appels téléphoniques virulents passés à la hiérarchie, de refus d’interviews. Voire d’une dégradation des conditions d’accès aux conférences de presse ou des entraînements. « Par le passé, il est arrivé que nous posions caméras et stylos en solidarité d’un confrère évincé d’une conférence de presse », a souligné David Phelippeau (20 minutes). Lequel est par ailleurs représentant de l’Union des Journalistes de Sport en France (UJSF), section ouest, un syndicat chargé de défendre la profession et de gérer notamment les tribunes de presse. L’occasion pour son confrère Simon Reungoat (Hit West), également ‘syndic’ de cette structure, de préciser qu’elles « doivent être réservées aux journalistes encartés qui travaillent sur l’évènement en question ».
Rapport de forces inversé ?
Résultat, depuis quelques années, les journalistes sportifs observent une sorte de « bunkerisation » des clubs, de football d’élite notamment. « Il y a 10-15 ans, nous pouvions interroger les joueurs dans les vestiaires, à la fin d’un match », a souligné Denis Bourdeau (Presse-Océan). C’est terminé. Désormais, nous ne pouvons même plus les croiser sur le parking à la sortie du centre d’entrainement » !
Philippe Audouin (RTL) a effectivement constaté qu’avec le temps « le rapport de forces s’est inversé : il y a 15-20 ans, le joueur avait peut-être plus besoin du journaliste que le journaliste n’avait besoin de lui. Aujourd’hui, c’est l’inverse. Le journaliste a moins de leviers d’action ».
Est-ce à dire qu’il doit se montrer plus « coulant » pour maintenir un bon relationnel et de meilleures conditions d’exercice ? « Il faut peut-être parfois ménager les susceptibilités », concède Olivier Cailler (Télénantes). « A chacun de trouver la bonne distance », reprend Simon Reungoat (Hit West) mais « proximité ne signifie pas connivence ». Bon à rappeler effectivement, quel que soit d’ailleurs le secteur d’activité du journaliste.
- Pour justifier sa position Florent Houzot a déclaré: « Nous sommes supporters de l’équipe de France ». Lire ici l’article de slate.fr sur le sujet : http://bit.ly/292cv9E