Quand des journalistes parlent aux communicants

 Apprendre à mieux se connaître. Trouver les bonnes façons de travailler ensemble. Comment se joindre le plus efficacement. Tels étaient les objectifs du débat organisé mardi 15 novembre au Médiacampus par le Club de la Presse de Nantes Atlantique et l’Apcom, une association nantaise qui regroupe 230 professionnels de la communication. 

   D’un côté des journalistes, plutôt demandeurs et bien représentés dans l’assemblée. De l’autre, des communicants très à l’écoute et critiques sur certaines exigences des journalistes. En tout cas, un débat courtois mais sans langue de bois comme en témoigne cette remarque d’une attachée de presse qui a travaillé pendant 18 ans pour un promoteur immobilier.

    «Vous partez du postulat que journalistes et communicants s’opposent» a-t-elle lancé aux 4 journalistes à la tribune. «Nous ne sommes pas ennemis. Pourquoi ne pas réfléchir autrement pour essayer de travailler ensemble ?»

    Le ton avait été donné dès le départ par l’animatrice Estelle Prusker, enseignante chercheuse à Science Com, avec l’intitulé de ce débat : «Journaliste et communicant : un duo gagnant pour une information de qualité».

Estelle Prusker, enseignante à Sciences Com, animait le débat avec les journalistes. De gauche à droite : Cédric Mané, Florence Pagneux, Benjamin Robert, Guénolé Seiler.

La question de l’urgence 

    Premier sujet de friction : le temps de réponse à une demande d’information précise, voire le manque de réponse.

     «Je ne comprends pas que des grandes entreprises ne soient pas organisées pour répondre à nos attentes le week-end» s’est insurgé Guénolé Seiler, rédacteur en chef à France 3 Nantes.

      «Le pire, c’est de ne pas répondre» a renchéri Thibault Dumas, journaliste à Médiacités et au Figaro. «Parfois, il faut envoyer plusieurs mails pour savoir que notre demande va être prise en charge. On perd du temps».

      «Ca ne sert à rien de faire la politique de l’autruche» a ajouté Cédric Mané, journaliste pigiste à Presse océan. «De toute façon, même sans réponse, on fera quand même le sujet».

      Dans la salle, la réplique des communicants ne s’est  fait pas attendre.  «Nous ne sommes pas des magiciens» a fait remarquer une chargée de relation presse indépendante.

   «On a des contraintes», a expliqué une communicante dans le domaine de la santé. «On doit trouver les éléments de langage nationaux et nos dirigeants ne sont pas toujours disponibles».  «Ce n’est pas de la mauvaise volonté si l’on ne vous répond pas dans l’heure» a souligné une autre responsable communication. «Parfois nous n’avons pas la réponse à la question posée».   

Les communiqués de presse : utiles ou pas ?

Emmanuelle de Kerros, co-présidente de l’Apcom et co-organisatrice de la soirée avec le Club de la Presse de Nantes Atlantique.

Autres points abordés : l’utilité des communiqués de presse, des dossiers de presse, des conférences de presse. Là aussi, les échanges ont été vifs mais constructifs.

   «Plutôt que des communiqués avec plein de chiffres, je préfèrerai que vous nous aidiez à raconter de belles histoires» a suggéré Florence Pagneux, correspondante de La Croix. «Mon journal est toujours à la recherche de sujets décalés ou d’innovations sociales».

     Même son de cloche pour Benjamin Robert, du Journal des Entreprises : «Un communiqué factuel va nous servir à alimenter notre site internet mais pour notre journal mensuel, on privilégie des sujets plus creusés pas forcément liés à l’actualité».

      Au final, quelques idées sont sorties du débat, par exemple des rencontres off ou des petits déjeuners pour créer du lien sans forcément de retombée presse, ou bien des groupes WhatsApp ciblés sur un évènement particulier pour partager avec tous les intéressés des informations utiles comme des points presse.

     Autres suggestions formulées par  Emmanuel Bouvet, auteur de l’Inventaire des médias indépendants sur Nantes : offrir des espaces de travail à ces journalistes aux moyens financiers limités, des relations presse personnalisées et des projets de collaboration adaptés à leurs petites structures.

      Bref, à défaut de former un duo gagnant, journalistes et communicants avaient besoin de se rencontrer pour mieux se comprendre. Le dernier échange de ce type remontait à 2018.

Thierry Bercault